somewhere in europe
Cette histoire commence à Edimbourg où vivait une jeune femme aux magnifiques cheveux d’ébène. Sa beauté était unique et ensorcelante, cette dame irradiait la beauté plastique au point de devenir une icône. Elle était la convoitise de nombreux hommes mais un seul fût l’heureux élu de son cœur. De leur amour, naquit un magnifique bébé qu’ils prénommèrent Millicent. La petite avait tout pour mener une vie parfaite. Elle avait une mère aimante et un père qui gagnait bien sa vie. Seulement, le sort avait décidé autrement. Son père avait fini par tromper sa mère et la quitta pour une autre, une dame de la noblesse. Il les avait lâchement abandonnées, échangées contre la gloire et le titre de Duc. Quant à sa mère, elle fut conduite au bucher, faussement accusée de sorcellerie. Elle fut inculpée de complot comme quoi elle préparait une vengeance contre ce dernier et la duchesse. Millicent n’avait alors à peine six ans que son chemin avait déjà commencé à s’assombrir laissant peu à peu les ténèbres envahir son cœur.
Cloitrée dans une petite chambre délabrée, Millicent vivait désormais sous le toit de son oncle côté maternel. C’était un menteur, un charlatan, un hypocrite et elle le maudissait, rêvant du jour où un démon lui arracherait le cœur. Il l’avait recueilli avec un sourire et lui avait soufflé des mots doux et réconfortants. Il avait promis un refuge et une maison chaleureuse. Ce n’était que des paroles en l’air… Lui, il ne voulait que l’argent. Oui, cette grosse somme que son salaud de père lui avait versé afin de tenir Millicent éloignée de la ville, loin de lui et de sa nouvelle famille. Tout comme sa mère, elle faisait partie du passé et elle devait y rester. Elle devait disparaître. Seulement son oncle n’avait nullement envie de la supprimer, ça serait du gâchis.
Maltraitée et esclavagée, elle était devenue la dame à tout faire de la maison. Des hématomes un peu partout sur son corps fragile, elle était le souffre-douleur favori de son oncle. A chaque fois qu’il croisait le regard de Millicent, il avait l’impression de voir sa sœur décédée. Elle avait le même regard profond et indifférent qui lui rappelait qu’il n’était qu’un moins que rien, un raté,
a piece of shit. Il était jaloux et frustré. Ainsi, il la battait. Néanmoins, son oncle ne l’avait jamais frappée au visage. Après tout, elle lui rapportait beaucoup de sous. Millicent travaillait durement, enchainant les petits jobs parfois pas très honnêtes pour nourrir sa grande famille. Elle n’était pas la seule à souffrir sous son toit et elle voulait épauler les autres enfants adoptés.
Un jour, son oncle décida de mettre sa beauté sur le commerce. Il la prit de force et l’emmena chez une connaissance dans une ville voisine. Là-bas, ils discutèrent business et l’avait vendue contre une belle somme. Contre son gré, elle était devenue une sorte de prostituée de luxe satisfaisant l’appétit des hommes corrompus de la société. Détruite, elle avait perdu ce qui lui restait de plus pure. Il n’y avait plus d’avenir pour elle, elle allait finir sa vie dans ce bordel. Alors qu’elle pensait mettre fin à sa vie, un jeune homme l’arrêta in extremis. C’était un noble garçon, un officier de la marine et elle s’était éprise de lui. Il la libéra de son statut de prostituée et elle était devenue Millicent Fitzroy, une parfaite épouse et femme au foyer.
Ils avaient beau former le couple le plus envié de la ville, leur mariage ne tenait qu’en réalité sur un fil. Millicent était belle et elle était le fantasme de nombreux hommes. Son mari était jaloux et ne pouvait s’empêcher de l’accuser d’un éventuel adultère se demandant si leur fils d’un an était bien le sien. Les disputes devenaient de plus en plus fréquentes. Puis un soir, alors que Millicent préparait le poulet pour le diner, son mari débarqua dans la cuisine fou de rage.
« You been screwin’ the milkman! » Il était fou et se déchaina sur elle. Il hurla une dernière fois.
« You been screwin the milkman ! ». Il la battait une dernière fois avant de retirer sa ceinture s’apprêtant à la violer. Et là, il se jeta sur le couteau qu’elle tenait dans ses deux mains fermes. Il se jeta sur son couteau dix fois.
– it was a murder but not a crimeDevenue criminelle, il ne lui restait plus qu’une chose à faire : fuir. Tenant son fils dans ses bras, elle implora à un capitaine d'un bateau marchand de la cacher et de l’embarquer avec les autres membres de l’équipage. Peu importait où ils allaient, elle était prête à recommencer sa vie à zéro si cela lui permettait d’être avec son fils.
somewhere out there
Installée confortablement sur son hamac, Laverna, anciennement connue sous le nom de Millicent, observait la lettre de marque accrochée à son mur. Elle s’amusait à lancer des dagues sur le document officiel comme si elle avait affaire à une cible. Cela faisait presque neuf ans qu’elle habitait à Charles Town et bientôt cinq ans qu’elle avait quitté l’équipage du Lys Noir pour devenir corsaire combattant pour la couronne d’Angleterre. Les années passaient vite mais Laverna se souvenait parfaitement de ce temps écoulé. En effet, il lui était difficile d’oublier la perte de son fils et la mort de son capitaine.
A l’époque, elle se serait donné la mort plutôt que devenir pirate. Capturée par ces bandits, elle fut séparée de son fils, présumé mort dans l’incendie qui suivait l’abordage, violée plusieurs fois puis mise à la vente au marché noir. Alors qu’elle se montrait bien indisciplinée parmi les esclaves, elle attira l’attention d’un homme ; le capitaine du Lys Noir. Il avait vu en elle le fantôme de sa sœur disparue en mer. Ainsi, sans la moindre hésitation, il acheta sa liberté et l’emmena sur son navire.
Loin d’être reconnaissante, Millicent se montrait plutôt froide et agressive. Pour elle, les pirates étaient des êtres sans cœur, des bêtes sauvages et elle ne comptait pas se mêler à eux. Ainsi, les premiers jours furent difficiles pour tout le monde. Elle était la folle furieuse de la chambre numéro sept, cette femme invivable que les pirates avaient du mal à la contrôler et à la supporter. Mais comme un mauvais orage, petit à petit elle avait commencé à voir le jour. Sur le navire, il faisait bon vivre et étrangement, aussi mauvais étaient-ils, elle s’était attachée à eux. Ils étaient les seuls pirates qu'elle tolérait. Lorsqu’enfin Millicent avait fini par devenir un membre à part entière de l’équipage, ses compagnons lui surnommèrent Laverna.
Laverna faisait partie des membres les plus anciens du navire. Avant de devenir maître pilote, la jeune femme fut personnellement entrainée par son gardien le capitaine. Loin d’être la plus forte physiquement de l’équipage, elle reste néanmoins la plus agile, discrète et rusée. Une fois l’ancre jeté, Laverna quittait son poste pour devenir éclaireuse ou pilleuse. Les serrures n’avaient aucun secret pour elle et comme une petite souris elle se faufilait partout sans trop se faire remarquer. Douée dans le vol et la manipulation, elle échangea son prénom pour celui de la déesse romaine des voleurs et des fourbes.
Très proche de son capitaine, elle le considérait comme son grand frère et meilleur ami. Ainsi, il lui fut très difficile d’oublier sa mort. Une erreur d’inattention lors d’un affrontement contre la marine anglaise et il s’était sacrifié pour la sauver. Rongée par la culpabilité, du jour au lendemain, Laverna quitta le bateau sans un mot et sans laisser de trace. Elle avait abandonné l’équipage et elle s’en alla dans un coin isolé de l’île. Personne n’avait vraiment réussi à la retrouver depuis. Récemment, certains avaient reconnu la jeune femme à une table d’une taverne. Entourée de soldat anglais, elle donnait l’air de bien s’entendre et de s’amuser. Avait-elle oublié ce que la marine avait fait à son capitaine ? Peut-être bien… Laverna était donc devenue un traître à éliminer, un traître qui s’était allié à la couronne anglaise.
Aujourd’hui, certains disent qu’elle avait tout planifié depuis le tout début et qu’elle aurait mené le capitaine à sa mort. D’autres plus fidèles pensent que ce n’est qu’une stratégie pour prendre sa revanche sur la marine. Une chose est sûre, Laverna porte bien son nom et ment comme elle respire. La vérité, elle seule la connaît.